L'historien et les mémoires de la guerre d'Algérie

PLAN A APPRENDE PAR CŒUR EN VU D’UN EXAMEN

1. En Algérie : mémoire de la guerre et identité nationale

A La mémoire de la guerre comme événement fondateur de la nation

Une mémoire polémique

De la mémoire à l'histoire ?


2. En France : de la mémoire occultée à la mémoire assumée

Une mémoire escamotée

Le temps des mémoires

Vers une difficile acceptation



FICHE REVISION (A lire et relire)

 

De 1954 à 1962, la guerre d'Algérie a été le conflit de décolonisation le plus douloureux pour la France. Conquise à partir de 1830, l'Algérie était la seule colonie de peuplement de l'empire français et comptait un million d'habitants européens en 1950. Elle était administrée comme la métropole : on y trouvait trois départements. Cependant, les populations musulmanes (Arabes et Berbères) n'obtiennent pas une réelle égalité des droits ni une représentation politique. Le 1er novembre 1954, le Front de libération nationale (FLN) lance une vague d'attentats. Le 18 mars 1962, les accords d'Évian sont signés et mettent fin à la guerre. C'est le temps de l'exil pour les Français d'Algérie – les « pieds-noirs » – et pour une partie des Algériens combattant du côté de la France – les « harkis ».
Sur chaque rive de la Méditerranée, comment s'organise le travail des historiens sur les mémoires de la guerre d'Algérie ? Comment leurs recherches, souvent difficiles (car les archives se sont ouvertes progressivement mais certaines ne le sont toujours pas), ont-elles été diffusées dans l'opinion publique ? En effet, dans le cas de la guerre d'Algérie, l'historien est confronté à une multiplication des points de vue qui correspondent autant à la diversité des situations vécues qu'à des prises de position politiques.


1. En Algérie : mémoire de la guerre et identité nationale

 

A La mémoire de la guerre comme événement fondateur de la nation

• En Algérie, au lendemain de l'indépendance, le FLN prend le pouvoir et instaure un système de parti unique. Il établit donc une version officielle de la façon dont la guerre doit être commémorée. Elle prend le nom de « guerre patriotique » ou de « guerre de libération ». Le but est de montrer que l'opposition à la colonisation française a soudé la nation, au-delà de la différence entre Arabes et Berbères. Le régime du FLN est d'inspiration socialiste (la guerre est parfois même appelée « révolution ») et passe des accords de coopération avec l'URSS. Cela conduit à célébrer les actions collectives, plutôt que les héroïsmes individuels. Le peuple est exalté, de même que le parti ou encore son armée, l'armée de libération nationale. Le pouvoir dénonce les crimes de guerre commis pendant le conflit, occultant les violences perpétrées par le FLN sur les autres partis ou contre les harkis et les Français après les accords d'Évian.
• Par ailleurs, le pouvoir algérien utilise la participation de ses dirigeants à la guerre pour justifier le fait qu'ils exercent le pouvoir. Cela n'empêche pas le parti de procéder à des purges en accusant certains de ses membres de trahison. Le héros de la guerre Ahmed Ben Bella, qui a été président de la République au lendemain de l'indépendance, est ainsi emprisonné par son rival et successeur Boumediene de 1963 à 1979.

• La mémoire de la présence française est souvent effacée : les monuments commémoratifs français, notamment ceux des deux guerres mondiales, sont détruits ou transformés, ou renvoyés en France, comme les statues de Jeanne d'Arc, ou encore les cloches des églises désaffectées après le départ des Européens.

 

Une mémoire polémique

• À partir des années 1980, ce discours est remis en cause par une partie de l'opinion publique. Les Berbères, et notamment les Kabyles, accusent l'État d'utiliser le mythe de la guerre nationale de libération pour justifier une politique d'arabisation, en imposant notamment la langue arabe comme seule langue d'enseignement.

• Le régime réagit alors en exaltant de nouveau les héros de la guerre et en faisant achever en 1982 un imposant mémorial destiné à la mémoire des martyrs, à Alger. Les termes de « martyr » et de « combattant » sont valorisés.

• Malgré cela, la participation à la guerre ne suffit plus à assurer un soutien unanime au régime. En 1992, les islamistes du Front islamique du salut remportent les élections législatives. Les dix années de guerre civile qui s'ensuivent se sont conclues par le maintien d'un pouvoir héritier du FLN.

 

De la mémoire à l'histoire ?

• Cela étant, le pouvoir continue à défendre une version officielle de la guerre. Le nombre des morts, fixé parfois à un million par le régime, ne peut toujours pas être vérifié par les historiens algériens faute d'un accès libre aux archives contrôlées par l'armée.

• Le pouvoir adopte une position ambigüe. Il donne parfois des signes d'apaisement de la mémoire, notamment lors de la visite du président Bouteflika à Paris en 2007. En 2006, ce dernier avait reconnu qu'il restait des zones d'ombre dans l'histoire de la guerre d'Algérie. Parfois cependant, le pouvoir algérien évoque la nécessité d'une réparation financière de la part de la France pour le préjudice subi pendant la colonisation et la guerre.


2. En France : de la mémoire occultée à la mémoire assumée

 

Une mémoire escamotée

• Au lendemain de la guerre, les Français souhaitent pour la plupart oublier le conflit. En effet, les Français se sont divisés pendant le conflit entre partisans ou non de l'Algérie française. Les présidents de la République parlent d'« événements », mais jamais de « guerre ». Seule la gauche radicale, pour dénoncer le pouvoir, emploie ce terme. C'est la « guerre sans nom ».

• Il n'y a donc aucune commémoration officielle du conflit et le silence est fait autour des exactions de l'armée, tout comme sur les drames personnels vécus par les acteurs du conflit. Des lois d'amnisties sont votées jusqu'en 1982 en faveur des anciens membres de l'Organisation de l'armée secrète (organisation terroriste en faveur de l'Algérie française) ou des généraux putschistes de 1961.


Le temps des mémoires

• À partir des années 1970 cependant, des témoignages exploitables par les historiens modifient lentement ce regard. Ces témoignages émanent de différents acteurs du conflit et montrent qu'il existe des mémoires vivantes de la guerre d'Algérie. Les pieds-noirs, au nombre d'un million, forment des associations nombreuses et se retrouvent lors de grandes cérémonies, comme le pèlerinage de Santa-Cruz d'Oran, rapatrié à Nîmes.

• Les harkis tentent de faire valoir leurs droits et dénoncent les conditions de leur accueil en France, dans des camps d'hébergement. Leur fidélité à la France a rendu leur mémoire gênante lorsqu'il a fallu négocier des accords avec l'Algérie indépendante. Ils revendiquent l'obtention de pensions équivalentes à celles des combattants français. Les appelés du contingent s'organisent également dans des associations d'anciens combattants et commencent à parler de la façon dont ont été menées les opérations.

• L'ouverture progressive des archives de l'Outre-Mer et de l'armée permet également à la recherche d'avancer. On a ainsi évolué dans l'évaluation du nombre de morts. Des associations de rapatriés tentent aussi de préserver et de valoriser le patrimoine culturel bâti par la France en Algérie, comme le Cercle algérianiste, ou encore les associations veillant à l'entretien des cimetières français en Algérie.

 

 

Vers une difficile acceptation

• Dans les années 1990, certains tabous tombent. Le terme de « guerre d'Algérie » devient officiel en 1999. La question de la torture est aussi abordée par les historiens. Elle conduit à une reconnaissance de la part des autorités françaises des atrocités parfois commises. Le président Jacques Chirac se rend en Algérie en 2003 et entérine ce travail de mémoire entrepris par la France. La présence en France de nombreux immigrés algériens qui souhaitent être éclairés sur cette part de leur histoire a sans doute contribué à ce que, dans le système scolaire, les historiens et enseignants en histoire soient portés à traiter ces questions.


En dernier lieu, Le président de la république française Emmanuel Macron, a reconnue « une forme de responsabilité » de l’Etat dans la torture en Algérie et dans l’assassinat de Maurice Audin, mathématicien communiste arrêté en 1957 puis porté disparu




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